Retrouvez mon interview dans le Journal du dimanche (JDD) du dimanche 5 mars 2017 au sujet de la campagne présidentielle.
Quel regard portez-vous sur la campagne de Benoît Hamon?
C’est ma huitième présidentielle, et c’est la première fois que j’ai du mal à me mettre en route. Je viens de lire le deuxième tract de Benoît Hamon: pas un mot sur l’action du gouvernement. Il considère qu’il progressera à gauche en passant le bilan par pertes et profits. Ce n’est pas ma conception.
Hamon devrait défendre davantage ce bilan ?
Quand j’entends Benoît dire que nous avons manqué notre rendez-vous avec les quartiers populaires, je suis heurté. C’est faux, et je crains qu’avec de tels propos, nous manquions notre rendez-vous avec le pays. J’ai 42 ans de parti derrière moi, je suis un socialiste légitimiste. Benoit est notre candidat, qu’il n’y ait pas de malentendu. J’ai envie que Benoît nous donne envie. Mais aujourd’hui, le compte n’y est pas.
Qu’est-ce qui ne vous convient pas ?
Sur le fond, j’ai des réserves, mais il a gagné sur un programme, je le respecte. Hamon a été un bon candidat à la primaire, puisqu’il a gagné. Mais ce n’est plus la question. Aujourd’hui, l’enjeu est de se qualifier pour le second tour et de battre Marine Le Pen.
Que doit faire le candidat Hamon ?
J’ai besoin aujourd’hui de signes d’ouverture. Les radicaux, les écologistes réformistes et beaucoup de socialistes n’ont pas été mis dans la boucle. Benoit s’est d’abord concentré sur l’accord avec Yannick Jadot, alors qu’il fallait, selon moi, avant tout rassembler sa famille. Je veux m’engager à ses côtés, je ne demande qu’à être convaincu.
L’accord avec Jadot vous gêne ?
Il me pose problème. Remettre en cause le Lyon-Turin ou Notre Dame Des Landes, ce n’est pas une bonne idée. Intégrer dans l’accord la fin de l’état d’urgence, soumettre la sécurité des Français à un deal électoral, c’est une ineptie. Alors qu’ils bénéficieront de 43 circonscriptions réservées, il est anormal que les Verts soient autorisés à se présenter partout, y compris contre Myriam El Khomri. Le soutien de Cécile Duflot à Caroline de Haas, est une pure provocation. Je demande à Benoît d’arrêter cela car ce n’est pas acceptable.
C’est un ultimatum?
C’est un appel à Benoît pour qu’il rassemble sa famille. On a besoin de preuves d’amour.
Et s’il n’en donne pas?
S’il était aujourd’hui à 20 ou 21% dans les sondages, je lui dirais : « Chapeau l’artiste ! » Mais là, nous sommes sur un faux plat qui dure. Je vois mes collègues ministres qui s’interrogent alors que nous sommes en permanence sur le terrain. Or c’est une course contre la montre: tout va se jouer dans les quinze jours. La vraie question, c’est : Benoit est-il en capacité de rassembler?
Mais ne vous étiez-vous pas engagé à soutenir le vainqueur de la primaire ?
Vous n’avez pas devant vous un frondeur qui signe une motion de censure, mais un grondeur, qui est inquiet et qui pense qu’à l’heure où nous parlons, toutes les conditions ne sont pas réunies pour que Benoît Hamon soit au second tour. Il est trop tôt pour parler de vote utile, et j’espère que les choses se remettront dans le bon sens. Il y a un risque de chaos démocratique, avec une extrême-droite aux portes du pouvoir et une droite en pleine déroute morale. Appeler à manifester contre la justice me glace et rappelle les ligues de 1934. Nous devons élever le débat.
Et si les choses ne se remettent pas « dans le bon sens », appellerez-vous à voter Macron ?
C’est une hypothèse. Ce n’est pas d’actualité, mais ce n’est pas exclu. Si cette décision doit être prise, elle devra l’être de manière collective…
Craignez-vous une migration massive des élus PS vers Macron ?
Aujourd’hui, la masse des étourneaux est sur l’arbre. Gare à ne pas les laisser s’envoler. Il est urgent que Benoît leur adresse un message.
Retrouvez l’intégralité de mon interview sur le site du JDD.
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